19 décembre 2019

Nos métiers

Le rapport qui inspire Blanquer depuis deux ans pour « repenser » notre métier.

En juillet 2018, un sénateur, Max Brisson, et une sénatrice, Françoise Laborde, rendirent leur rapport sur le métier d’enseignant, qui fut ensuite examiné en commission.
Ce rapport, qui évoque très rapidement les difficultés du travail quotidien des enseignants, insiste surtout sur le manque d’attractivité, les difficultés et lacunes de la formation initiale et continue, les freins dans la gestion des personnels qui empêchent d’adapter ces derniers « aux réalités du métier et aux objectifs du système éducatif »…

Ci-dessous certaines des propositions issues du le rapport pour remédier aux difficultés perçues par ce sénateur et cette sénatrice. Vous verrez que le ministère en a déjà suivi certaines, en rouge ci-dessous. En bleu un peu plus loin, vous verrez une proposition des sénateurs, pour nous éviter de nous "ankyloser", c’est le terme utilisé dans le rapport p.85.
Les autres serviront sûrement de boîte à outils à notre ministre qui projette de « repenser » nos métiers, dans le cadre de la « revalorisation » présentée comme contrepartie du projet réforme des retraites.

Extraits de la synthèse du rapport :

"UN CADRE D’EXERCICE A ACTUALISER EN REGARD DES ÉVOLUTIONS DU MÉTIER
Les recommandations de vos rapporteurs :
• Revoir les obligations de service dans le second degré : annualiser le service d’enseignement et prévoir un forfait annualisé pour l’exercice des missions liées ; a minima, porter à deux le nombre d’heures supplémentaires année (HSA) pouvant être exigées.
• Instaurer une obligation de formation continue effective de cinq jours annuels, hors du temps d’enseignement ; investir dans la qualité des formations, en partant des besoins exprimés par les professeurs et en privilégiant des formations de proximité.
• Accroître l’autonomie pédagogique des établissements, les évaluer et confier davantage de responsabilités aux professeurs, donner un statut d’emploi à certaines fonctions.
• Concentrer les futurs efforts de revalorisation du traitement sur le début de carrière, créer des dispositifs d’aide au logement et au transport dans les zones tendues ou isolées, doter les professeurs de matériel informatique."

"RÉNOVER LA GESTION DES ENSEIGNANTS
Vos rapporteurs proposent en conséquence :
 de permettre au recteur de définir des territoires à besoins éducatifs particuliers, en faveur desquels il pourrait décider de mesures spécifiques ;
 de développer le recrutement sur profil et de redéployer les agrégés au lycée ;
 de permettre l’affectation par contrat de mission : un engagement réciproque entre le professeur et le rectorat pour une affectation à durée déterminée, avec garantie de retrouver son poste à l’issue ;
-d’introduire une obligation de mobilité, fonctionnelle ou géographique."

"La gestion des ressources humaines doit être fortement déconcentrée et rapprochée des besoins.Il convient de donner davantage de perspectives de mobilité et d’évolution professionnelle aux professeurs, en permettant et en encourageant d’autres modalités d’exercice du métier (bivalence, décloisonnement entre le premier et le second degrés) ainsi qu’en facilitant la mobilité externe, y compris définitive."

"Le système éducatif ne peut reposer de manière durable sur le dévouement mal récompensé de ses professeurs ; vos rapporteurs souhaitent en conséquence une prise en compte plus importante de la valeur professionnelle dans l’avancement."
Note du SNES-FSU : Dans le texte complet du rapport (p.88-90), c’est davantage l’investissement de quelques uns, repérés par l’institution, qui est présenté comme insuffisamment récompensé. Ils proposent plus concrètement de renforcer le poids des appréciations dans l’accès à la hors-classe et à la classe exceptionnelle. Rien n’est dit sur le contingentement de l’avancement. Ils ne proposent donc pas une meilleure reconnaissance du mérite de tous les personnels qui se dévouent au fonctionnement du système éducatif, mais de renforcer le poids de la hiérarchie dans l’attribution de récompenses plus fortes, toujours en nombre limitées et peut-être même plus rares.

Lien vers la page du sénat avec rapport et synthèse.

Extraits du débat en commission. Vous verrez que certains sénateurs font des propositions sans connaître la réalité de ce dont ils parlent. En italique, nos commentaires.

J.Grosperrin :
L’action des enseignants s’est avérée néfaste pour l’image des enseignants.
C’est surtout les conditions d’exercices et la faible rémunération qui sont néfastes pour l’image des enseignants. Elles sont le résultat de l’action du ministère.
Leur cogestion doit être remise en cause.
Ce qu’il appelle cogestion, c’est le fait que les projets de mouvement et d’avancement étaient présentés aux représentants du personnel pour avis. La transparence et la consultation démocratiques ont bien été remises en cause par le ministère. Le sénateur Grosperrin doit être satisfait.
La formation continue devrait également être obligatoire et je considère qu’elle fait partie du contrat passé avec l’enseignant, je ne suis donc pas totalement convaincu qu’elle doive donner lieu à indemnisation, même lorsqu’elle a lieu en dehors des heures d’enseignement.
L’indemnisation qui existe pour le moment peut être réduite ou supprimée sur simple décision ministérielle.Le Voeu du sénateur Grosperrin sera sûrement satisfait prochainement
Ajouter deux heures aux obligations réglementaires des enseignants représenterait l’équivalent de 45 000 postes supplémentaires.
Encore un point sur lequel ce sénateur a été entendu.

Olivier Pacaud :
Le mouvement national des affectations profite d’abord à ceux qui sont syndiqués et la cogestion doit être reconsidérée.
Le mouvement national n’existe plus depuis … 20 ans !!! Les syndiqués n’ont jamais échappé au barème.
Quant à la bivalence, la situation des professeurs d’enseignement général de collège (PEGC), qui venaient des écoles pour enseigner au collège, pourrait nous inspirer.
Les PEGC, dans leur grande majorité, n’enseignaient qu’une matière dès qu’ils en avaient la possibilité.

Jean-Claude Carle : Les statuts en vigueur datent des années 1950.
Non, 2014.
Je suis convaincu que l’expérimentation et la contractualisation, avec les collectivités territoriales, au plus près du terrain, nous permettrons de lutter contre les corporatismes.
Les enseignants de lycée qui travaillent dans la Région Grand Est sont eux convaincus que l’expérimentation et la contractualisation avec la région sur les lycées 4.0 a abouti à les empêcher de travailler.

Guy Dominique Kennel : Modifier radicalement le projet d’établissement, en lui conférant une part plus importante dans le recrutement des enseignants qui auraient alors des objectifs à atteindre et seraient évalués par rapport à leur réalisation, serait une innovation. D’ailleurs, les établissements qui suivent cette démarche obtiennent d’excellents résultats.
Aucun exemple ou aucune étude n’est citée à l’appui de la dernière assertion.En revanche, les effets pervers de telles « innovations », anciennes de plusieurs décennies aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, par exemple, sont bien connus (cf. Alain Chaptal, ou Romuald Normand par exemple).

Jean-Pierre Leleux : La formation des enseignants devrait comporter des cours d’art dramatique pour les aider à mieux faire passer leurs messages pédagogiques.
Sans commentaire.