Le SNES écrit à la DGESCO
17 juin 2010
DGESCO : direction générale de l’enseignement scolaire. Entre autres missions, la DGESCO a pour mission d’élaborer les programmes. Elle est dirigée par J-M. Blanquer, ex recteur de Créteil.
Lors de l’audience qui nous a été accordée le 10 juin, Philippe Le Guillou, doyen de l’IG de Lettres, nous a déclaré, à propos des Mémoires du Général de Gaulle au programme en TL, que l’Inspection Générale n’avait aucun pouvoir pour modifier des programmes publiés au BO. Selon lui, c’est à la DGESCO que nous devons nous adresser. Dont acte : nous venons d’écrire à J-M. Blanquer. Voici le courrier :
A l’attention de M. Jean-Michel Blanquer, Directeur général de la DGESCO
M. le Directeur,
Nous nous permettons d’attirer votre attention sur la question du programme de littérature pour la classe de terminale L, publié au B.O. du 14 janvier 2010. En effet, le choix d’œuvres arrêté cette année par l’Inspection Générale a suscité de nombreuses réactions de la part des enseignants de lettres, qui s’inquiètent à plus d’un titre.
Ce programme, qui prévoit l’étude de trois œuvres du XXe siècle et d’une œuvre issue de l’Antiquité, leur semble tout d’abord très déséquilibré.
D’autre part, la présence du tome 3 des Mémoires de Guerre du Général de Gaulle ne leur semble pas adaptée, ni conforme à l’esprit initial de ce programme, qui prévoit en effet d’étudier des œuvres clés du patrimoine littéraire français et étranger. Même si le statut d’écrivain du Général de Gaulle n’est pas contesté, la place du tome 3 des Mémoires de Guerre dans le programme ne semble pas s’imposer pour des élèves se destinant pour la plupart à poursuivre des études littéraires et pour lesquels l’étude d’œuvres majeures, telle qu’elle était menée jusqu’ici, semble infiniment plus urgente.
Par ailleurs, beaucoup de collègues s’interrogent sur la nature de ce texte qui se présente principalement comme le témoignage d’un homme d’état sur son époque. Nous ne contestons pas le fait que cet ouvrage contienne des passages à tonalité épique ou lyrique mais cela suffit-il pour autant à faire de cet ouvrage un texte à visée littéraire ? Cela justifie-t-il son étude intégrale en cours de littérature ?
Ce choix problématique place par ailleurs les collègues dans une impasse pédagogique lourde : en effet, il existe fort peu de travaux de recherche universitaire en littérature concernant ce texte et les collègues se sentent très démunis pour l’étudier de façon pertinente. Leur formation littéraire ne leur permet pas non plus de disposer de connaissances historiques suffisamment pointues pour aborder cette étude en classe. Beaucoup se déclarent embarrassés pour construire des séquences pédagogiques pertinentes mais aussi des sujets de bac littéraire adaptés et faisables pour les élèves, qui se trouvent, rappelons-le, dans une classe d’examen. Nous constatons que l’Inspection Générale, qui est à l’origine de ce choix, n’a fourni aucun document d’accompagnement de nature à aider les enseignants.
Les difficultés majeures que nous rencontrons au niveau de l’exploitation pédagogique nous conduisent aujourd’hui à vous demander une nouvelle fois que ce texte soit retiré du programme au profit d’un autre qui ne ferait pas débat, ce qui permettrait de rééquilibrer l’ensemble du programme tout en ramenant la sérénité nécessaire à sa mise en œuvre.
Beaucoup de collègues se demandent également selon quelles modalités ce choix d’œuvres a été arrêté. Afin de les éclairer sur ce point, nous vous serions reconnaissants de bien vouloir nous indiquer la date de réunion de la commission, ainsi que sa composition précise. D’après les informations dont nous disposons, et qui ont d’ailleurs été confirmées par M. Philippe Le Guillou, doyen, cette commission ne semblait pas comporter d’enseignants, ce qui nous semble anormal et contraire aux procédures habituelles. Nous souhaiterions également connaître la teneur des débats qui ont eu lieu et comprendre les motivations ayant conduit au choix de ce programme.
M. Philippe le Guillou, que nous avons rencontré le 10 juin nous a invités à nous adresser à vous sur ces questions. C’est la raison pour laquelle nous nous permettons de vous écrire aujourd’hui.
Dans l’attente d’une réponse rapide de votre part, nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Directeur, l’expression de notre considération distinguée.
Magali Espinasse, pour le groupe lettres du SNES
Roland Hubert, co-secrétaire général du SNES